Une étude de Défi métiers, le Carif-Oref francilien, s’est penchée sur la continuité de l’activité de formation durant le premier confinement et ses différentes modalités d’application, à travers des entretiens réalisés auprès de 56 organismes de formation (OF) d’Ile-de-France.
Au cœur de la continuité, la capacité des OF à la mettre en place
De nombreux facteurs ont eu une incidence sur le fait d’être en mesure de poursuivre l’activité pour les OF (fermeture administrative, demande des financeurs). Trois éléments ont été prépondérants dans la (non) continuité de la formation :
- Le contenu de la formation : certaines n’ont pu être continuées que dans leur dimension théorique ou pas du tout car elles portaient sur l’apprentissage de gestes professionnels ou nécessitaient du matériel spécifique : c’est le cas de formations vers des métiers dits « manuels » (électricien, cariste, coiffeur).
- La pratique antérieure du distanciel : les organismes qui utilisaient déjà les outils pédagogiques à distance (notamment via le blended learning) ont eu plus de facilités à basculer la totalité de leur catalogue de formation. Pour les autres OF, sans pratique préalable du distanciel, cette transition a pu se faire, mais au prix d’un plus lourd investissement en temps et financier.
- La possibilité pour les stagiaires de continuer la formation : il était indispensable que les stagiaires soient équipés (a minima d’un smartphone, idéalement un ordinateur personnel et une connexion Internet) et en mesure de s’en servir. Lorsque cela n’était pas possible pour une majorité des apprenants, la formation était généralement suspendue. À ces impératifs numériques s’ajoutent d’autres paramètres primordiaux dans la bonne poursuite de la formation (pouvoir travailler dans de bonnes conditions notamment).
Une mise en œuvre du distanciel souvent dans l’urgence
De nombreux organismes de formation n’étaient pas préparés au distanciel et ont disposé d’un laps de temps très court pour basculer leur activité. La continuité pédagogique a alors souvent pris la forme d’une transposition des contenus vers des supports numériques plutôt que d’une transformation. Dans ce cas, l’adaptation des cours a été articulée autour de deux moyens de diffusion principaux : la tenue de visioconférences et l’envoi de cours et exercices par écrit (mail, messages).
Moins fréquemment, la formation a davantage été revue en profondeur via une réingénierie, l’achat de « contenus sur étagère » lorsqu’ils existaient ou l’intégration de tutoriels. Des ressources ont été mises en ligne par des acteurs comme la FFP qui propose un kit de transformation ou encore le FFFOD qui édite un guide pour choisir sa plateforme de formation et un autre de « bonnes pratiques ».
Des usages d’outils hétérogènes, la place centrale du smartphone
Le smartphone s’est affirmé comme le hardware central durant le confinement, principalement car possédé par une majorité d’individus, contrairement aux ordinateurs. Mobile learning, visioconférences, échanges entre apprenants et avec les formateurs : son usage a été pluriel dans un contexte inédit. L’utilisation d’outils peu conventionnels dans la formation concernait également les logiciels : la visioconférence s’est faite sur des outils traditionnels (Zoom, Teams, Skype) ou non (Discord, plateforme dédiée aux jeux vidéo en ligne), et les échanges autant par mail que via WhatsApp ou Messenger. Si les organismes appartenant à un réseau (Afpa, Greta) ont pu bénéficier des solutions propres à celui-ci, l’utilisation de Learning Management System n’a pas été la norme durant ce premier confinement (des processus de mise en place ont cependant été impulsés par certains OF durant cette période).
Suite au confinement, quelle vision du distanciel ?
La formation à distance n’est pas apparue avec le confinement, mais celui-ci a contraint des OF qui en étaient éloignés à s’y essayer et à accélérer à marche forcée la mise en place du distanciel. En effet, la plupart des OF estiment qu’ils pourront réutiliser les nouvelles pratiques expérimentées. Certains ont ainsi pris la mesure de l’importance de la réingénierie pédagogique et du nouveau positionnement des formateurs, sans avoir eu le temps de les mettre en œuvre. De nombreux OF conviennent de la nécessité de s’ouvrir au distanciel tout en soulignant l’importance du présentiel, et n’envisagent pas un basculement total (hormis dans des situations exceptionnelles comme un confinement).
Pour un plus fort développement du distanciel, les principales recommandations de l’étude sont :
- Accompagner les organismes dans la mise en place de formations et pédagogies adaptées et les former à la gestion de crise.
- Identifier les stagiaires n’étant pas en mesure de suivre la formation et généraliser les « bonnes pratiques » facilitant leur poursuite.
- Engager des réflexions autour des questions relatives au financement des formations en distanciel (1), des modalités de délivrance des certifications (2) et des alternatives possibles aux heures de stages en entreprise (3).
Guillaume Chuvin (co-auteur de l'étude)
Lire l’étude complète de Défi métiers
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