La notion même d'action de formation est changée par la Réforme. La journée de stage, souvent de fait considérée comme l'action de base, se voit notamment concurrencée par la FOAD en général et le e-learning en particulier. Cette concurrence existait déjà en pratique, mais elle n'était pas à ce point officialisée, et les conditions d'utilisation du "distanciel" à ce point assouplies. Cette redéfinition devrait déboucher sur une plus large utilisation du e-learning sous toutes ses formes (opportunité 1) et une meilleure visibilité des investissements formation (opportunité 2) par l'intégration plus systématique du e-learning dans les budgets formation auxquels il échappait jusque-là.

Ce que la Réforme dit sur la possibilité de prouver l'assiduité du stagiaire par les travaux rendus par celui-ci renforcera le lien entre la formation et le travail, sauf à ce que ces travaux soient choisis en totale indépendance des situations de travail effectives (ce qui serait une aberration andragogique). Opportunité 3, donc : le terrain semble propice au développement du modèle 70:20:10 qui permet d'harmoniser le développement des compétences individuelles par l'expérienciel (70%), le "social learning" (20%) et la formation structurée. D'une façon générale, les contraintes posées sur la formation distancielle devraient avoir une influence positive sur l'ingénierie pédagogique et la qualité des offres e-learning (opportunité 4). On peut faire raisonnablement le même pari concernant l'évaluation (opportunité 5) : il est grand temps que l'offre et la demande prennent cette question au sérieux, sauf à connaître des lendemains qui déchantent.

La Réforme insiste sur l'importance des moyens d'accompagnement pédagogique et technique de l'apprenant à distance, en particulier des compétences des formateurs et autres tuteurs en charge de l'assistance. Soyons optimistes : la professionnalisation des acteurs de la formation y gagnera grandement (opportunité 6), ainsi que la reconnaissance de leurs compétences. Dès lors qu'on attend des fournisseurs (internes ou externes) d'administrer la preuve qu'ils sont bien alignés pour servir la Réforme, le niveau d'exigence devrait réciproquement s'éléver pour les clients de la formation (salariés et métiers) ; nous pouvons voir dans l'avénement de cette réciprocité une possibilité (opportunité 7) de favoriser la notion de contrat entre les parties prenantes de la formation - une démarche qui ouvre sur de réels progrès des dispositifs sous la responsabilité du responsable formation.

Le CPF permettra-t-il au e-learning de décoller (opportunité 8) ? Difficile à dire ; ces mêmes attentes qu'on fondait au lancement du DIF ont été largement décues. En revanche, le fait que le CPF appartienne à la personne et puisse la suivre tout au long de sa vie professionnelle permettra de facto de créer un lien même ténu entre l'entreprise et le salarié, avant l'entrée de celui-ci et après qu'il l'ait quittée - opportunité 9 : un ensemble d'opportunités, pour les entreprises et les fournisseurs (notamment de plateformes technologiques), liées à ce que je qualifierais de  gestion du "talent étendu".

Terminons par l'essentiel, cette dixième opportunité, entrevue tout au long de ce qui précède : le courant d’innovation qui devrait sortir renforcé de la Réforme. Innover pour renforcer l'efficacité de la formation, innover pour optimiser la formation. Innover : un maître-mot dont on pressent qu'il va largement inspirer les temps à venir.

Michel Diaz