DSI et Direction formation se regardent parfois encore en chiens de faïence ; pourtant leurs intérêts sont liés plus que jamais, dans la transformation numérique généralisée qui leur offre un vaste champ d’opportunité sous réserve de remettre en cause un mode de fonctionnement qui leur est en partie commun…
Deux directions “support”, sorte d’états dans l’Etat (l’entreprise)
Pour la DSI, les choses étaient (relativement) simples. Peu de dirigeants osaient les affronter, car l’entreprise cesse de fonctionner du jour au lendemain si son système d’information s’arrête, et parce qu’ils s'avouent in petto n’y pas comprendre grand chose. Les budgets étaient et restent largement préservés. Les utilisateurs ne sont pas considérés comme des clients, mais comme des usagers de processus auxquels ils ont rarement contribué ; on ne se préoccupe pas vraiment de leur mettre rapidement entre les mains des systèmes aussi conviviaux que ceux dont ils usent en tant que particuliers.
La formation, c’est autre chose. Pour les dirigeants, elle restait en marge, faute que son impact sur la stratégie et les résultats de l’entreprise soit assez probant, et parce qu’elle constituait une chasse gardée des partenaires sociaux et de la Direction formation / DRH, arcboutée sur des processus administratifs et fiscaux d’une lourdeur d’un autre âge. Manne assurée par la taxe, pas suffisante pour qu’on puisse former tous les salariés aussi souvent que nécessaire, mais tout de même assez pour en faire des obligés (parfois aussi la formation comme compensation à des augmentations de salaire inférieures aux attentes).
DSI et Direction formation, pareillement bousculées par la transformation numérique
La DSI veut s’abriter derrière son expertise technique : après tout, le digital, c’est aussi de l’informatique ! Les dirigeants lui ont fait ce crédit, jusqu’au constat que la DSI avait du mal à répondre aux nouveaux enjeux. Le "Chief Digital Officer” a fait son apparition comme chargé de mission auprès des dirigeants, il obtient parfois une équipe à part entière, pour prendre en charge tout ce qui ressort du digital. Car le digital, ce n’est pas seulement “de l’informatique”, mais une culture qui se veut justement en rupture avec la “culture informatique” traditionnelle.
La Direction formation est aussi mise en cause par le digital. Elle croyait avoir pris de l’avance avec l’e-learning datant d’une quinzaine d'années. À tort, car cet e-learning est conçu et produit selon des principes largement inspirés de la formation traditionnelle : un ou plusieurs sachants (concepteur multimédia et expert) se réunissent pour séquencer des modules, comme ils le feraient pour un cours en salle (en sus : la maîtrise d’un outil auteur que sa complexité rend inaccessible à la plupart des néophytes).
Une alliance plus que jamais nécessaire
La relation entre les DSI et Direction formation s’est initiée il y a plusieurs décennies dès que la formation a commencé à s’informatiser, ne serait-ce que pour remplir ses obligations réglementaires. Elle s’est amplifiée avec l’arrivée des plateformes LMS (Learning Management Systems), qui contrairement aux TMS (Training Management Systems) sont potentiellement utilisées par tous les salariés-apprenants. Progressivement la Direction formation s’est à juste titre emparée de la maîtrise d’ouvrage de sa plateforme.
Aujourd’hui, le digital pèse de son poids sur la DSI comme sur la direction formation, qui ont des modes de fonctionnement apparentés (pour simplifier : top-down, processus lourds et rigides et délais de service incompatibles avec la nouvelle économie). Cette menace a un avers : l'opportunité historique de se glisser dans le rôle élevé et la posture qu’on attend d’elles. Posture semblable : le salarié est un client (de la DSI, de la direction formation), les processus informatique et de formation doivent être simplifiés et allégés chaque fois que c’est possible, les deux doivent contribuer au développement de la culture et des usages digitaux, par la mise à disposition d’outils modernes inspirés du web et du mobile (DSI), par l’acculturation et l’accompagnement du personnel, etc.
Dans l’acquisition de cette posture et de sa traduction concrète dans les opérations, DSI et Direction formation peuvent s'entraider. Aux responsables formation d’imaginer par exemple comment ils peuvent aider les équipes de la DSI à acquérir les softskills attachées à la transformation digitale de leurs activités… Il est temps qu’une nouvelle alliance se noue !
Michel Diaz
|