Pour Claire Bernagaud, consultante et chargée de missions chez Ingenium digital learning, l’adaptive learning n’est plus une promesse mais une réalité en constante évolution. De l’intégration précoce dans Moodle jusqu’aux projets actuels dopés par l’IA, elle explique comment Ingenium digital learning mise sur l’innovation, l’éthique et la souveraineté pour concevoir des dispositifs de formation sur mesure et durables dont ses clients tireront le plus grand bénéfice.
Ingenium digital learning intègre l’adaptive learning dans ses dispositifs de formation ?
Claire Bernagaud : Le sujet de l’adaptive learning est depuis longtemps au cœur de nos réflexions et des développements spécifiques que nous faisons autour de la plateforme Open Source Moodle. D’ailleurs, c’est un point important à souligner : grâce à son code ouvert, Moodle nous a permis, au fil des ans, de nous emparer des avancées technologiques pour proposer des solutions d’adaptive learning toujours plus poussées. Ainsi, dès 2018, nous déployions pour l’AFD un dispositif de formation dédié à la passation des marchés, intégrant la notion de « formation juste-à-temps ». Concrètement, un arbre de décision embarqué dans Moodle permettait à chaque utilisateur de concevoir son parcours de formation sur mesure, en répondant à une série de questions : vous souhaitez faire financer quel type de projet ? Pour quel montant ? Maitrisez-vous déjà les bases de la passation de marché ? etc. En fonction des réponses, Moodle générait alors un parcours adapté au contexte spécifique de l’apprenant, en allant piocher les activités dans un centre de ressources développé par Ingenium.
En 2020, avec l’arrivée de xAPI et des LRS, nous avons franchi une nouvelle étape, dans le cadre d’un consortium avec un CHU et une agence de création de Serious Game, en concevant un dispositif associant Moodle et LRS. Le résultat ? Un dispositif permettant aux apprenants de se former dans des serious game, de leur pousser des comptes rendus personnalisés dans Moodle à la fin de chaque partie de jeu, et de générer de nouvelles parties tenant compte de ce qu’ils maitrisent et des erreurs commises dans les parties précédentes. Ce système fonctionne toujours et s’avère très efficace pour maintenir l’engagement des apprenants et les inciter à rejouer.
Aujourd’hui, l’IA ouvre de nouvelles perspectives et nous permet d’envisager des solutions, toujours autour de Moodle, allant beaucoup plus loin. Nous travaillons actuellement avec un consortium d’entreprises et d’universités, au développement d’un dispositif d’adaptative learning dans Moodle, capable de prendre en compte les profils, préférences et progressions des apprenants pour leur proposer des activités et des ressources adaptées.
Votre approche semble se distinguer des solutions anglo-saxonnes…
Claire Bernagaud : Sur le plan technologique, nous n’avons rien à envier aux solutions d’adaptive learning anglo-saxonnes ! L’IA nous ouvre le même champ des possibles. Sur le plan pédagogique, je pense que notre exigence quant à la prise en compte de nombreux critères comme le niveau d’études, les appétences pour tel ou tel type de contenus, le temps que l’apprenant veut consacrer à son apprentissage… nous amène à avoir une réflexion véritablement centrée sur l’apprenant. Mais c’est surtout sur le plan éthique que notre approche se différencie. Non seulement parce que le cadre juridique européen porté par l’IA Act nous y encourage aujourd’hui — avant de nous y contraindre sans doute demain (ce qui, au fond, va sûrement dans le bon sens), mais également car nous utilisons l’IA en étant très conscient de ses limites. Comme le rappelait Frédéric Bardeau, CEO de Simplon, dans un webinaire en septembre 2025, « les IAG ont encore aujourd’hui un taux de faux positifs, que l’on appelle à tort des hallucinations, mais qui en fait sont de vraies erreurs, de plus de 50 % ». Ainsi, dès leur conception, nos dispositifs d’adaptive learning intégrant de l’IA prennent en compte ces biais. Cela dit, l’éthique, c’est aussi la transparence sur la provenance des sources, la protection des données collectées, le respect des utilisateurs… des principes qui doivent être inscrits à l’origine de chaque projet.
Quels défis spécifiques rencontrez-vous en matière de souveraineté numérique ?
Claire Bernagaud : La souveraineté numérique devient une préoccupation de tous les jours. On sait y répondre sur les technologies stabilisées (l’hébergement de plateformes open source Moodle en France est une réponse simple), mais pour les projets IA, le défi est plus complexe car le domaine est encore très mouvant. C’est pourquoi nous nous appuyons sur les meilleures expertises pour faire des choix pérennes.
Pour revenir à l’adaptive learning, les équipes d’Ingenium digital learning le considèrent comme un levier essentiel pour renforcer l’efficacité des dispositifs de formation digitale, et l’on constate aujourd’hui que de nombreuses plateformes revendiquent ce type de fonctionnalités, de façon plus ou moins poussée et automatisée. L’avenir est donc en marche ! Avec Moodle, même dans une version simple, il est déjà possible de faire de l’adaptive learning… mais au prix d’un temps de conception et d’ingénierie pédagogique long et exigeant, ce qui n’est pas à la portée de tous les formateurs. C’est pour cette raison qu’Ingenium investit sur ce sujet : notre ambition est de proposer des solutions d’adaptive learning dans Moodle qui soient éthiques, souveraines et automatisées.
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