Un bel esprit de suite, donc : Cegos, SkillSoft et beaucoup d’autres éditeurs leaders dans le domaine des contenus de formation professionnelle en ligne, sont rejoints par les présentations TED. Un saisissant raccourci sur l’évolution des contenus e-learning.

D’abord l’usage de la vidéo et la place centrale offerte au conférencier : les conférences TED donnent la parole aux meilleurs experts et praticiens d’un domaine, directement mis en scène et filmés dans un format plébiscité par les apprenants. Belle revanche des formateurs, en quelque sorte, alors qu’on s’inquiétait de leur remplacement par d’anonymes et souvent ternes modules e-learning. Mais des formateurs occasionnels se prêtant avec sérieux au modèle TED : un quart d’heure (la moitié ou le tiers du temps qu’on devait consacrer à une session de formation en ligne il y a encore 7 ou 8 ans), dans une scénographie ne laissant aucune place au hasard, traitant rapidement du sujet, portant les messages essentiels, largement structurée sur les principes du storytelling : on parle presque autant de soi que du thème traité, lequel ne saurait retenir l’attention, semble-t-il, que s’il est incarné (et si le conférencier réussit à émouvoir). Il y faut du talent ; la plupart des conférenciers TED en ont ; à défaut le talent leur est venu en répétant beaucoup.

Autre évolution : la diversité des thèmes traités dans les conférences TED. Dès lors qu’on a quelque chose à dire, d’utile, d’intéressant, d’innovant, et qu’on se trouve être un des protagonistes clés du domaine, on peut espérer devenir un conférencier TED (mieux vaut toutefois maîtriser l’anglais). Diversité des thèmes ; énormité du catalogue : TED a accumulé des milliers de références qu’aucun éditeur e-learning ne saura égaler si le mouvement se poursuit. Ces références sont classées par domaine, un moteur permet une recherche plus précise. Surtout le Web 2.0 est passé par là, avec ses hiérarchies : sont mises en évidence les conférences les plus vues, qui seront forcément les plus visitées par les nouveaux arrivés (Panurge n’est pas loin, mais il faut admettre que les conférences "stars" sont souvent les plus passionnantes).

Des formats de formation, des interfaces qui évoquent les MOOC (en plus grand puisque les conférences TED ont été consommées plus d'un milliard de fois sur les douze derniers mois), car les deux ont pu s’inspirer mutuellement, à ceci près qu’issues d’une communauté internationale de partage d'idées à but non lucratif les conférences TED sont totalement gratuites. C’est une partie de ce catalogue - une sélection de playlists de discours TED Talk - que Cornerstone OnDemand met dorénavant à disposition de ses clients (environ vingt millions d’utilisateurs dans le monde) depuis tout terminal, notamment mobile. Une balle dans le camp des éditeurs de talent management systems qui ont annoncé parfois trop vite leur intention d’intégrer des MOOC sur leur plateforme (dans le camp aussi de LinkedIn qui s'annexe progressivement les divers champs du "talent", comme on a pu le voir avec sa récente acquisition de lynda.com (plateforme de MOOC).

Une façon pour l'éditeur de Santa Monica d’aider les entreprises à développer leurs apprentissages sociaux : les connaissances véhiculées par les conférences TED (nombre de domaines concernent le monde de l'entreprise) pouvant être partagées, commentées, amplifiées. Ce qu’a bien compris Deron Triff, le directeur de la distribution et des licences Ted : "Ce partenariat nous permet également de découvrir comment nos discours peuvent être utilisés pour le développement professionnel. Cornerstone fera un allié formidable pour introduire les TED Talks en entreprise et stimuler l'innovation au sein du personnel." Dont acte : l’académie digitale démocratisée.

Michel Diaz